L'arrêt facultatif de la
Draye du Pradal
s'effectuait dans un environnement abrupt et peu ensoleillé,
une
soixantaine de mètres
avant une maisonnette
semblable à celles du Vivier et du PN des Crozes,
à un bon
demi-kilomètre du viaduc du Blocard.
Les
ingénieurs de la
Compagnie de chemin de fer, ayant visionné
le cadastre
napoléonien, savaient que
la plate-forme ferroviaire allait devoir traverser la
"draye pour les troupeaux
du Languedoc" ;
antique
et
sommaire voie, peut-être d'origine gauloise, et si importante
pour
l'économie rurale du pays qu'elle figure sur la carte de
l'état-major...
à
moins que la
bâtisse n'ait été qu'une maison cantonnière ?
Cette hypothèse est confirmée le 27 juillet 1935 par "l'Auvergnat de Paris" qui écrit : le Conseil municipal de Saint-Germain-de-Calberte émet le vœux que la Micheline s'arrête à la maisonnette du cantonnier du Pradal.
Le nombre réduit
d'ouvertures laisse
supposer qu'une famille ne vivait
pas ici, dans cet endroit peu hospitalier, sans replat ni
lumière.
La lumière est
venue beaucoup plus tard. Par le toit.
En tant que
maisonnette de
garde-barrière, elle n'aurait eu besoin
d'être habitée qu'à la belle saison, au
moment des transhumances.
En tant que maison de poseurs :
Une brigade devait
établir ici ses
quartiers
en tant que de besoin, dans un secteur particulièrement
propice aux
éboulements et aux ruissellements. Un endroit
idéal pour les
maquisards, qui furent nombreux au pays des camisards.
Le
soupirail trahit une cave, donc une construction "aux
normes",
avec chaînages en harpe.
Ses lieux
d'aisance sont toujours visibles
un
peu plus haut dans les bois.
Le hameau
du Pradal,porté sur la carte de Cassini (1756
- 1845),
se situe sur
l'autre rive de la Mimente, à l'adret.
En 1914, les convois traversaient la "draye pour les troupeaux du
Languedoc" sans s'arrêter. Sauf
lorsque le train venait à être
bloqué par
l'orage.
L'orage
de la nuit dernière a été si violent
que d'énormes avalanches
ont obstrué la voie et fait dérailler le train
à la sortie du tunnel de
Jalcreste. Voyageurs et employés ont passé la
nuit à déblayer la voie.
Un train de secours parti la nuit de Florac a été
également bloqué au
poste de Cassagnas,
à
2 kilomètres du premier. Aucun accident
à signaler.
Le
train de voyageurs qui arrive à Florac à
22 heures 15, a été
arrêté
hier près de la gare du Rouve-Jalcreste par un amas de terre
important
qui a provoqué le déraillement de la machine et
de trois wagons.
Une
machine de secours, demandée au dépôt
de Florac, a eu le même sort au
kilomètre 20. Ces obstructions sont
dues aux pluies
diluviennes qui sont
tombées dans la soirée et toute la nuit.
Pour
le Petit
Provençal, le
train de secours se trouve réduit à une machine
qui aurait, elle aussi
déraillé, non plus devant le poste de Cassagnas
mais au km 20, ce qui
revient au même mais ne renseigne pas
sur l'usage de la
maisonnette.
L'enraillement des
véhicules qui a été
fait sous une pluie battante a
nécessité 8 heures de travail. Le train a ensuite
continué sa marche
sans autre incident.
Si la ligne a pu être
si rapidement
dégagée, on le doit à l'infatigable
dévouement et au zèle de M. Ruel,
inspecteur de la Compagnie, et
de tous
les agents présents qui ont payé largement de
leur personne.
M. Bon,
lieutenant de gendarmerie à Florac, revenant de voyage, a,
malgré la
pluie, prêté son concours pour activer les travaux.
laisse s'échapper à droite un chemin
de randonnée fléché
"Solpéran - 0,7 km".
La courbe amorcée à la frontière communale
se prolonge derrière un amas de roches, au-delà duquel, le randonneur, se retournant,
bénéficie d'une dernière vue sur le pont du Blocard.
1908
La
première locomotive
Vendredi à 6 heures du soir, la
locomotive qui doit procéder à la pose des rails
depuis Florac jusqu'au
col de Jalcreste est arrivée dans nos murs.
Les curieux assistaient en foule à cette arrivée,
et rien d'étonnant à
cet empressement.
On
avait dit si longtemps qu'un chemin de fer était une utopie
pour notre
région, que l'arrivée de cette preuve
matérielle que les vraies
locomotives vont bientôt emplir nos gorges sauvages de leurs
sifflets
stridents, a fait plaisir à tout le monde, et que tout le
monde a voulu
voir. Et puis on n'était
pas fâché non plus de
savoir comment on transportait sur
route un géant si leste sur nos rails.
Des attelages si puissants se
voient
rarement.
Pour grimper la côte de Saint-Privat, il a fallu atteler
14 chevaux et 16 bœufs. Le coup
d'œil en valait la peine.
Le transport de Sainte-Cécile à Florac
a duré quatre jours.
Florac,
6 décembre. - La crue du Tarn, du Tarnon, du Mimente, du
Vébron et du
Vivien augmente toujours.
Leur cours charrie des animaux
et
d'énormes
châtaigniers entiers...
La voie
ferrée est coupée en divers
endroits, notamment
à Jalcreste et
à la Devèze, par des éboulements qui
ont jusqu'à trente mètres de
longueur ou de profondeur.
En attendant les
réparations, la
circulation du chemin de fer est interrompue pour quelques jours,
à
moins de transbordements...
C'est de cette
gare que les touristes gravissent allègrement
le signal de St-Maurice-de-Ventalon, haut de 1354 m.,
qui est
l'un des
principaux sommets de l'imposant massif du Bougès.
Non loin de la Rouve, le col
de
Jalcreste s'ouvre dans l'axe des
Cévennes (à 832 m.) et
sépare le versant océanique de celui
de la
Méditerranée. De l'hôtel Nogaret,
l'œil découvre un magnifique panorama.
En pénétrant sur l'emprise de la gare du
Rouve-Jalcreste,
où en la quittant en direction de Florac,
les voyageurs
ne pouvaient manquer d'apercevoir le café
Siméon
Jouanen,
établi en bordure de "l'avenue"
d'accès à la gare.
L'établissement n'était pas inconnu des cheminots
locaux et de passage.
En 1905,
il
était prévu de construire :
Une
station dite du col de
Jalcreste,
quartier de Soussiarles, commune de
Saint-André-de-Lancize, à droite de la
ligne au point
kilométrique 21k 673m 80,
ouverte au
service complet de la grande et de la petite vitesse,
desservie par une avenue d'accès
de 6m de
largeur,
La population du hameau du Rouve insista pour quela stationporte aussi son nom.
La cour des voyageurs jouxtait la cour des marchandises.
1935
Florac, 12 mars.
Neige et tempête continuent à bloquer les trains
dans les
Cévennes ; les
accidents redoutés se sont produits. De mémoire d'homme
l'on avait vu dans la région un temps pareil.
La
neige tombe depuis deux jours.
A
Jalcreste, elle a atteint 1 m. 80...
Les bus ne peuvent plus circuler, les
trains de la compagnie
Sainte-Cécile, à Florac, sont bloqués.
Le train descendant vers
Cassagnas, le train montant vers Jalcreste y ont passé toute
la nuit de
dimanche à lundi. Jugez de l'irritation des voyageurs
pendant cette
nuit de tempête.
Voici
le Rouve-Jalcreste,
avec toutes
les altitudes
de 830
à 1350 mètres (dont
celle de la gare à 790,566
mètres),
avec sa rivière bordée d'arbres et de prairies
herbeuses, le vert
manteau de genêts qui couvre le Bougès, un beau
bouquet de chênes dix
fois séculaires et de châtaigniers à
peine plus jeunes, les vallons de
Vieljouves et de Rabiers, que rafraichissent sans cesse les sources de
la Mimente, et l'atmosphère riche en ozone des grandes
altitudes.
Allez
au Rouve, vous tous, qu'une poitrine délicate oblige
à quitter en été
la poussière et la fumée des villes, vous
y trouverez dans quelques
années une immense forêt de pins
déjà plantée par l'administration, qui
vous réconfortera mieux que les plus habiles docteurs, et,
en attendant
qu'elle se dresse au dessus des genêts qui l'abritent
à cette heure,
vous ferez, sur la route de St-Germain-de-Calberte, à
2 kilomètres
de
Jalcreste, de ravissantes et salutaires promenades, dans la
sapinières
de Saint-Privat-de-Vallongue (cinq kilomètres
d'étendue à
1000 mètres
d'altitude)..
A partir de la gare du Rouve-Jalcreste, les convois de bois
pouvaient être
acheminés sans difficultés vers la gare PLM de
Sainte-Cécile-d'Andorge
grâce au profil descendant de la voie.
Le train
repartait
légèrement au nord-est,
à travers l'emprise
de la station,
en contrebas du Rouve-Haut.
26 juillet 1914.
Troisième version.
Déraillement.
- Par suite des grandes pluies du commencement de la semaine,
un
éboulement s'est produit sur la ligne
Florac-Ste-Cécile
à la sortie
du tunnel de Jalcreste. Le rail disparaissait totalement
sous le
gravier.
Le train qui arrivait de Sainte-Cécile
sortit de la voie.
Heureusement le mécanicien garda sa présence
d'esprit. Il mit tous les
freins en mouvement, et le train bloqué s'arrêta
presque aussitôt, sans
qu'il y eut le moindre accident.
Les
voyageurs trouvèrent
un abri au café
de la Gare.
Et sans désemparer les employés se mirent
à déblayer.
Après bien des difficultés, la gare de Florac fut
télégraphiquement
avisée. On forma un train de secours qui lui aussi demeura
en panne
vers Cassagnas. Inspecteurs, hommes d'équipe et terrassiers
arrivèrent
à pied sur le lieu de l'accident. La voie fut remise en
état et les
deux trains purent rentrer à Florac sans autre incident.
Ce troisième récit du déraillement
complète les deux autres. Chacun
apporte des précisons, non pas sur ce qui s'est
réellement passé mais
sur la manière de réagir, en pareil cas, à l'époque.
Les convois s'évanouissaient dans l'obscurité du
tunnel, à destination
de l'arrêt de Marveillac.