la voie déferrée entre en tranchée
sous un court chemin de service
et revient prendre sa place
auprès de l'Aveyron.
Un vestige ferroviaire se tient
à la croisée d'un chemin de service qui
n'apparaît
ni sur le profil en long de la ligne ni sur les photos
aériennes
de 1946.
En mai 1855, le Courrier
de Tarn et
Garonne parle de "575 ouvriers employés, en ce moment, aux
travaux du chemin de fer dans le canton de Saint-Antonin" et un mois
plus tard, le chiffre
s'élève à 848.
Sur ce total, tous ne sont pas étrangers au pays. La
population
locale participe, de façon importante, aux travaux.
A
Saint-Antonin, l'attrait des
salaires des chantiers (souvent de 2,50 F à 3 F, par jour,
pour les
terrassiers) est sans doute vif dans une population laborieuse mal
rémunérée et chroniquement sous
employée.
Dans cette activité des
chantiers, la population de Saint-Antonin semble surtout fournir
l'apport de main d'oeuvre peu qualifiée (beaucoup de
terrassiers)
rémunérée à la
tâche).
D'autre
part, la construction des ponts, aqueducs, et surtout des gares
et maisonnettes de garde-barrières apporte un
surcroît de
travail aux
artisans du bâtiment (maçons, tailleurs de pierre,
charpentiers). Tous les charretiers et rouliers sont
également
mis à
contribution ainsi que les forgerons et charrons qui construisent ou
entretiennent le matériel roulant des chantiers ainsi que
les
outils.
La voie, en courbe,
sautille un aqueduc de 0,45 mètre
affecté à l'écoulement des
fossés
latéraux
avant de venir
s'appuyer sur un mur de
soutènement
avec parapet.
Une courte tranchée
libère la voie
déferrée
et lui permet de s'écarter des pentes du Pech des Panissous
pour virer à gauche en parallèle de l'Aveyron.
Les
accidents de
travail sont nombreux sur le chantier de construction de la voie
ferrée. La technique et l'outillage sont rudimentaires. La longueur et le rythme des
journées de travail (10 heures par jour semblent le
minimum), la hâte des entrepreneurs,
l'alcoolisme qui
paraît répandu sur les chantiers, augmentent les
risques
physiques et concourent sans doute à la poussée
de la
mortalité qui est remarquable dans toutes les communes traversées
par la voie.
A Saint-Antonin, on
dénombre
36 morts* et le problème a une dimension suffisante pour que
les
"dames de St Maur", en 1855, "ouvrent à Saint-Antonin, dans leur
hospice, une salle spéciale pour les blessés du
chemin de fer".
*peut-être pas tous morts d'accident
Un litige, devant la
Justice de Paix
de Saint-Antonin, nous apprend que Roussenac, maçon
à
Saint-Antonin, fournit en 1858, près de 25 mètres
cube de
pierres de taille au prix de 35 F le mètre cube pour la
construction des maisonnettes de gardes (2,72 mètres cube
par
maisonnette).
de sa construction à nos jours, a dû
coûter beaucoup plus cher.
Les chantiers du chemin de fer apportent à Saint-Antonin, un
afflux de circulation monétaire qui va bouleverser
le cadre d'une économie locale encore largement
fondée
sur l'autoconsommation et où l'argent est
extrêmement rare.
Ainsi
des achats de terrains pour le site de la
voie représentent en volume, d'après les évaluations que nous avons pu faire,
environ trois fois le
budget annuel de la commune.
Somme
considérable à une période
où, sous la
pression de la surpopulation des campagnes, la terre est
très
chère à Saint-Antonin et les transactions sans
doute
assez rares.
Les bouleversements occasionnés par les travaux de
construction
de la voie ferrée à Saint-Antonin ont fatalement
touché tous les villages approchés par la ligne.
Les incidents et les accidents assez nombreux qui émaillent
les premières années de l'exploitation de la voie
ferrée entretiennent un climat de méfiance.
La
rapidité avec laquelle on a construit la ligne est
à l'origine de déraillements. Les glissements de terrain en
sont souvent la cause.
On sait aussi que deux enfants de garde-barrières sont
écrasés par des trains entre Penne et
Saint-Antonin : l'un en 1860, l'autre en 1883.